Les photographes reporter free-lance ou salariés récoltent une masse de clichés intéressants lors de leurs reportages. Leurs meilleures photos, après avoir illustré les articles de presse, peuvent se retrouver dans leurs pages internet personnelles.
Ces professionnels de l'image ont l'habitude de saisir sur le vif des moments rares et percutants, et il est interessant de retrouver après l'action ces instantanés hors de leur contexte d'origine.
Portraits dérobés
L'actualité, les reportages photo touristiques, apportent chaque jour dans la presse une moisson de ces portraits.
Les personnalités y sont prises dans leurs occupations et même si elles avaient connaissance de la présence du reporter photographe ou du paparazzi, absorbées dans leur activité, le plus souvent elles l'ont oublié. Aussi ce type de portrait nous apporte-t-il souvent un visage en mouvement, avec ses rictus, ses tics, et un corps aux gestes et aux expressions incontrôlés, une sorte de "flagrant délit". Les images de ces reportages qui visent l'homme en action, que celle-ci soit politique ou sportive, peuvent être très représentatives de l'ensemble de la personnalité ou au contraire n'en traduire qu'un aspect limité. La photographie des sportifs appartient à cette dernière catégorie. Concentré sur son activité, le sportif a en quelque sorte tout son esprit dans ses muscles à cet instant et l'image n'exprime que cette adhésion totale, que cette coïncidence de l'être et du sport. Nous aboutissons au portrait d'une idée, d'une activité plus qu'à celui d'un homme.
Les portraits volés s'apparentent également à la photographie sociologique : expression pittoresque d'une marchande des quatre saisons, gestes qui disent la joie ou la lassitude, les êtres vibrent de vie sous l'objectif du photographe ; ils nous séduisent souvent par la vigueur avec laquelle ils expriment les sentiments humains les plus répandus que nous n'osons pas souvent afficher : cupidité, méchanceté, jalousie, avarice, ironie.
Le reportage au hasard des rues nous apporte cette grande fresque humaine. Ces reflets d'un instant de vie pour exacts qu'ils soient n'en ignorent pas moins la véritable personnalité du sujet, un instant de commérage fait-il de nous une commère pour le reste de l'existence ? Plutôt que de portraits nous pourrions parler de masques, la photographie de reportage nous en apporte une grande collection sans pouvoir nous dire si ce masque ne faisait que passer ou s'il est l'être lui-même.
Nous n'acceptons aisément ces "images à la sauvette" vues dans les journeaux et magazines comme portrait que parce que nous ne connaissons pas les personnes photographiées, mais si elles concernaient des être qui nous sont chers ou nous-mêmes, alors nous les récuserions souvent, trouvant que l'accidentel n'est pas représentatif. Plus l'intimité avec les sujets s'éloigne, plus la connaissance que nous en avons diminue, plus nous sommes prêts à accepter n'importe quelle représentation de l'homme comme portrait.
Les grands reporters journalistes photographes apportent de plus en plus des pays lointains des représentations de l'être humain que faute de point de comparaison nous prenons pour des portraits ; notre seul garant est l'honnêteté du photographe.