Comment devenir photographe ? Améliorer sa technique ? Faire des books photos ? Le résultat obtenu après une prise de vues n'est pas forcément celui escompté au départ. Les techniques photo permettent d'obtenir un résultat satisfaisant, mais elles peuvent être sophistiquées et difficiles à apréhender.
L'expérience de chacun peut être partagée grâce au dévouement de photographes professionnels de métier.
Différant déjà par l'origine, la culture et la formation, les photographes ont d'autant plus de mal à se mettre d'accord pour défendre leurs propres intérêts, que leurs spécialités établissent entre eux des distinctions plus profondes.
Ces spécialités sont multiples : portrait, reportage, documentation, mode, publicité, illustration. Selon les cas, les spécialistes sont indépendants ou collaborateurs réguliers d'un journal, d'une revue, d'une maison d'édition, d'une agence, d'une administration ; certains au contraire sont liés par contrat pour quelques semaines ou quelques mois, c'est le cas des photographes de cinéma qui sont chargés de saisir, au cours d'une prise de vue, les aspects les plus typiques des scènes principales, les expressions caractéristiques des acteurs.
Photographier et créer à son image.
L'empreinte d'une main aux doigts écartés, cernée de rouge, le rouge du sang et de la vie, sur la roche d'une grotte préhistorique, ce fut sans doute la première image de l'homme, peut-être déjà liée à une idée de survie.
Mais la concentration de groupes humains d'origine variée aboutit, en différents points du globe, à un échange culturel qui forge des civilisations. L'homme dessine, sculpte et peint abondamment son image, sorte de défi à sa vie éphémère, sous l'influence de la pensée religieuse d'abord, de son ambition politique ensuite et de son idée philosophique enfin.
Attirer la protection des dieux, c'est le but de Summer avec ses statuettes d'adorants aux yeux fascinants. L'Egypte confie à l'image personnelle le soin de recevoir son double, son "ka", après la mort. Le portrait semble vouloir toujours perpétuer la vie terrestre.
Mais déjà les Grecs et les Romains individualisent le portrait en le situant dans le contexte de leur vie active, familiale, intellectuelle et politique et ceci jusqu'à la naissance du christianisme. Dans cette nouvelle conception spirituelle, outre l'image que l'on se fait de Dieu, le portrait a pour mission exclusive de transmettre aux futures générations les traits d'hommes influents tels que les saints et les papes. Il entre dans l'histoire religieuse pour plusieurs siècles de tradition, sous forme de fresques, tableaux, mosaïques ou rondes-bosses.
Cependant, avec la chute de l'empire romain le portrait perd, pour quelque temps, de son importance. Les invasions barbares apportent des idées nouvelles qui troublent l'âme. L'image de l'homme serait un intermédiaire, un double de sa personne, qui peut entraîner les pires sorcelleries. La crainte du maléfice est si rebelle que le Moyen Age use d'artifices divers pour en conjurer les effets. Les papes et les donateurs n'osent plus se faire représenter seuls mais toujours escortés de personnages célestes. C'est ainsi qu'ils apparaissent sur les vitraux, les fresques italiennes, les retables français, flamands et espagnols. Par ailleurs, l'imagerie populaire fleurit aux chapiteaux des cloîtres. Le tailleur de pierre orne une colonne d'un visage grimaçant en proie à des puissances démoniaques, puis il attache au fronton d'une église romane la déchirante et rude noblesse d'un saint drapé dans son manteau.
Il faut attendre la Renaissance pour libérer véritablement le portrait et l'extraire de l'emprise religieuse. Les rois, les princes et les notables se l'approprient délibérément. Les artistes florentins et vénitiens imposent leur style mais les Flamands restent réalistes. C'est aussi l'époque où l'on voit apparaître, en Italie et en Allemagne, les personnages sur un fond de paysage. Cependant, les Français et les Espagnols individualisent davantage l'image, par une analyse très minutieuse du détail et de la ressemblance, et mettent leur talent non seulement au service de la cour mais aussi de toute la noblesse. Au fil des siècles se forgent alors les grandes académies européennes. Mais c'est, aux Pays-Bas, à l'Angleterre et à la France que les bourgeois du 17e siècle doivent de pouvoir accéder au portrait. Les grands maîtres ne les dédaignent pas, leur concédant des prix très inférieurs à ceux des commandes religieuses. On représente, en vue de galeries de tableaux, un groupe de personnages officiels, un gentilhomme en velours d'apparat, une jolie femme dans ses dentelles.
Et puis, insensiblement, l'image de l'homme dévie de son but initial vers des voies diverses. Elle devient plus intime avec la vogue des miniatures, représentative avec des reconstitutions de batailles, gracieuse avec des scènes bucoliques ou purement artistique avec de grandes compositions symboliques.
En occident, sous le pinceau des romantiques puis des impressionnistes, plusieurs styles modernes vont se préciser. Le portrait, dès lors, n'est plus nécessairement ressemblant. C'est l'annexion du modèle par le peintre et le sculpteur, au rythme de leur imagination. La notion d'expression individuelle a perdu ses droits au bénéfice de l'art créatif.
Partout dans le monde, chaque civilisation a signé ses portraits. Les Incas, les Mayas et les Toltèques qui portent sur leur visage de pierre toute la tragédie de leur vie, leur goût du mythe et de la légende. Le peuple de Viracocha, soupçonné d'avoir émigré du Pérou à l'Ile de Pâques, pour nous intriguer avec des colosses aux visages hermétiques. L'Inde, où la puissance des dieux souvent symbolisée par une femme est à l'origine de portraits érotiques, sous le signe éternel de la fertilité du monde. Et l'ancestral Extrême-Orient, avec des rois et empereurs, plus ou moins déifiés qui prennent parfois l'apparence de Bouddha. L'Afrique et l'Océanie continuent de perpétuer leur goût commun du fétichisme. L'homme est avant tout représenté dans sa vie rituelle. En se créant un nouveau visage, il reçoit en délégation la puissance d'esprits supérieurs dont il a tout à craindre. C'est aussi le portrait tribal dont il est fier, pour que vivent ses traditions. Le sang, la glaise, la pierre, le bois, le verre, la broderie, le crayon, la peinture ont servi à créer une certaine image de l'homme, au fil des siècles et des civilisations : l'homme dans ses croyances, son travail, ses émotions, sa vie enfin. Il fallait bien que ce rôle revienne aussi à la photographie.